La rentrée académique 2025-2026 a officiellement démarré ce lundi 15 septembre sur l’ensemble du territoire béninois. À Ouidah, enseignants et apprenants ont répondu présents à l’appel. Mais derrière l’enthousiasme de la reprise se profilent déjà de nombreux défis entre contraintes financières, problèmes de sécurité et conditions précaires dans le privé. DBMEDIAS est allé à la rencontre des acteurs du système éducatif, ainsi que d’élèves et de parents de cette cité côtière située à 42 kilomètres à l’ouest de Cotonou, pour recueillir leurs impressions.
Au Collège d’Enseignement Général 2 de Ouidah, la rentrée s’est ouverte dans la ferveur. Fidèles à la devise « Travail, Discipline, Succès », enseignants et apprenants ont affiché un enthousiasme palpable pour entamer cette nouvelle année académique. Au signal du directeur, M. Adanhoumey Lambert, la sirène a retenti, ouvrant la voie à la traditionnelle cérémonie des couleurs. Dans une ambiance solennelle, l’hymne national a été repris en chœur, marquant officiellement le top des activités éducatives. « Tous les enseignants sont présents. Nous n’avons ni absents ni permissions. Ils sont tous revenus des vacances en bonne santé et prêts à affronter l’année », s’est réjoui le directeur Lambert Adanhoumey, au micro de DBMEDIAS.
Des familles entre pression financière, reconnaissance et critiques
Dans les complexes privés Ocean Memphys et Jean Paul II, les préparatifs ont démarré bien avant la rentrée, mais sur le terrain, les difficultés des parents ne passent pas inaperçues. Les longues files d’attente devant les bureaux de comptabilité et d’administration traduisent la pression économique. « Tous les parents ne savent pas lire ni écrire. Il faut les accompagner dans les démarches, ce qui prend du temps et complique la tâche », explique Prince-Agbodjan Jacques, enseignant au complexe Jean Paul II. Un parent d’élève rencontré au complexe Océan Memphys, préférant garder l’anonymat, a déploré la situation. « C’est compliqué, et chaque année c’est le même refrain. Beaucoup de parents ont du mal à inscrire leurs enfants à cause du coût de la vie qui ne fait qu’augmenter. », a déclaré ce père de famille âgé de 43 ans. Malgré ces difficultés, certains parents saluent les réformes et résultats obtenus dans le système éducatif les années antérieures. Djogbenou Ernestine, parent d’élève et agent SGDS a profité de l’occasion pour remercier le gouvernement. « Les parents aussi doivent accompagner cet effort pour la réussite effective. » a-t-il souligné. D’autres, en revanche, pointent du doigt certaines dérives. Quenum Victoria, agent de la mairie et mère d’élève aperçue au CEG2 Ouidah , interpelle directement. « Il faut que les enseignants soient compétents et conscients de leur travail. Enseigner n’est pas un sous-métier. Ils doivent éviter certains comportements, notamment la consommation d’alcool pendant les heures de cours. »
Les inquiétudes des apprenants
Les élèves ne cachent pas non plus leurs préoccupations. Ranavalo Akaye, jeune bénino-brésilienne nouvellement inscrite en classe de Seconde au CEG 2, avoue son désarroi. « Je suis toute nouvelle au Bénin. Mes parents me manquent déjà… Mais je crois qu’avec le temps, ça ira. » a-t-elle indiqué avec l’ère un peu triste. Shaolin Gligbé, orphelin en classe de Terminale au complexe Jean Paul II, s’inquiète pour son avenir. « J’ai travaillé pendant les vacances au Togo pour gagner un peu d’argent. Aujourd’hui, je dois tout dépenser pour les frais scolaires. Si je ne réussis pas au BAC, que deviendrai-je ? », s-est-il interrogé.
Sécurité et conditions de travail : des urgences à régler
La rentrée a également révélé un problème crucial, la sécurité des établissements. Plusieurs écoles de la commune ont constaté des vols et dégradations de leurs équipements pendant les vacances. « Nous avons constaté la disparition de certains équipements. Il faut des mesures pour mettre fin à ces actes », alerte GBAGUIDI Terance, enseignant de mathématiques et d’économie au CEG 2. Le secteur privé, lui, lance un cri d’alarme sur les conditions de travail. Le complexe Jean Paul II, fort d’un taux de réussite de 100 % au CEP 2025, dénonce la précarité salariale des enseignants dans le secteur privé. « Malgré leur qualification, beaucoup perçoivent des salaires en dessous du SMIG », regrettent ses responsables, appelant l’État à intervenir.
Entre ferveur et difficultés, la rentrée scolaire 2025-2026 à Ouidah illustre les contrastes du système éducatif béninois. Si la mobilisation des enseignants et des apprenants témoigne d’une volonté commune d’aller de l’avant, les réalités sociales et matérielles rappellent les défis immenses qui attendent l’école béninoise. Neuf mois de combat viennent de commencer.
Reportage: Patrice SOWANOU (Stg)